Chemin rural : la commune doit-elle l’entretenir ?
Le cadre juridique applicable aux chemins ruraux est parfois délicat à appréhender. La question d’une éventuelle obligation d’entretien de ces chemins à la charge des communes est souvent posée.
> Le chemin rural : domaine privé des communes
Tout d’abord, pour rappel, les chemins ruraux sont ceux qui appartient aux communes, qui sont affectés à l’usage du public et qui ne font pas partie de la voirie communale.
Ces chemins relèvent du domaine privé des communes.
En tant que tel, ils ne bénéficient pas des principes d’imprescriptibilité et d’inaliénabilité applicables aux biens relevant du domaine public des communes (article L. 3111-1 du Code général de la propriété des personnes publiques).
Les chemins ruraux doivent être distingués des chemins d’exploitation. Contrairement aux chemins ruraux, les chemins d’exploitation sont, en l’absence de titre, présumés appartenir aux propriétaires riverains, et servent exclusivement à la communication entre divers héritages ou à leur exploitation (article L. 162-1 du Code rural et de la pêche maritime).
> Le principe : pas d’obligation d’entretien à la charge des communes
S’agissant plus précisément de la question de l’entretien, il demeure que les communes n’ont par principe aucune obligation d’entretenir les chemins ruraux situés sur leur territoire. Cela fait l’objet d’une jurisprudence constante du Conseil d’Etat (notamment en ce sens : CE, 30 juillet 1997, n°160935). La jurisprudence justifie cette absence d’obligation à la charge des communes en considérant qu’il résulte d’une lecture combinée des articles L. 141-8 du Code de la voirie routière, L. 161-1 du Code rural et de la pêche maritime et L. 2321-2 du Code général des collectivités territoriales, que les dépenses obligatoires des communes incluent les dépenses d’entretien des seules voies communales, dont ne font pas partie les chemins ruraux (CE, 24 mars 2014, n°359554).
Toutefois, la jurisprudence considère que, par exception, une telle obligation d’entretien des chemins ruraux pèse sur les communes lorsque, postérieurement à leur incorporation dans la voirie rurale, celles-ci ont réalisé sur ces chemins des travaux destinés à en assurer ou à en améliorer la viabilité (CE, 20 novembre 1964, « Ville de Carcassonne« ). Ainsi, le Conseil d’Etat a-t-il retenu la responsabilité de la commune sur le fondement du défaut d’entretien normal lorsqu’elle a accepté, dans les faits, d’assumer l’entretien d’un chemin rural (même arrêt).
Il est à noter que la jurisprudence retient rarement une telle obligation et attend du requérant qu’il démontre que la commune est intervenue régulièrement. Ainsi, ne sont pas regardés comme traduisant une volonté d’assurer l’entretien d’un chemin rural des travaux de faible ampleur réalisés en urgence dans un souci de sécurité, tels un comblement d’ornières sur une petite surface dans le seul but de limiter les risques d’accident (CAA Marseille, 2 avril 2013, n°10MA02495). De même, n’ont pas été regardés comme tels des interventions limitées dans le temps comme la fourniture de matériaux et le curage ponctuel des fossés (CAA Bordeaux, 1er déc. 2005, n° 02BX00209).
En revanche, la jurisprudence a pu voir dans certains travaux plus importants la volonté – et donc l’obligation – de la commune d’entretenir un chemin rural. Tel est le cas :
- De travaux de stabilisation de la chaussée, même ne portant que sur une portion de voie réduite à dix-huit mètres, desquels résultent une amélioration de la viabilité du chemin rural (CAA Lyon, 22 décembre 2022, n° 21LY01408) ;
- De travaux de canalisation du ruissellement des eaux de pluie et de débroussaillage des bas-côtés une fois par an (CAA Bordeaux, 13 juillet 2011, n°10BX02494).
Le juge administratif exerce donc un contrôle in concreto sur l’importance et sur la régularité des travaux réalisés par une commune pour en déduire l’existence ou non d’une obligation d’entretien du chemin rural.
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